Audition de Jacques Barrot

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http://www.dailymotion.com/videoxcsllcIl ne me semble pas vous avoir proposé l’audition de Jacques Barrot avant sa nomination au Conseil Constitutionnel.

C’était le 24 février 2010. Je n’en garde pas un très bon souvenir. Comme me l’écrivit après un universitaire « sur bien des questions j’ai trouvé Jacques Barrot évasif et l’absence de « droit de suite » s’est faite cruellement sentir. J’avoue avoir été  étonné ; le sentiment m’est venu qu’il connaissait en définitive assez mal les décisions du CC … On ne peut qu’espérer qu’à l’avenir ces auditions se fassent plus incisives».

Hélas, depuis lors, la commission des Lois n’a pas réfléchi sur les améliorations possibles. Notre règlement prévoit pourtant la possibilité de désigner un rapporteur pour mieux préparer l’audition par exemple en recensant les positions adoptées par l’impétrant sur tel ou tel sujet ou encore en analysant ses écrits.

Rien de tout cela ne sera fait avant mercredi prochain où se déroulera une nouvelle audition : celle de Jeannette Bougrab, préalablement à sa nomination à la HALDE.

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4 réponses à Audition de Jacques Barrot

  1. Nathalie dit :

    Mr URVOAS vous êtes juriste professionnel et très reconnu à l’Assemblée Nationale dans votre spécialité. Mr BARROT est plus professionnel et compétent que vous sur tous les sujets concernant les transports par exemple. Je lui fais entièrement confiance pour maîtriser les rouages de ses nouvelles fonctions rapidement, comme j’espère, que vous vous améliorerez dans des domaines sans rapports direct avec le droit.

    Réaction de JJU
    Madame,
    Comme vous pourrez le lire dans mon post, je ne me suis pas permis d’émettre un jugement sur les qualités réelles ou supposées de Jacques Barrot. J’ai simplement indiqué que j’étais déçu par son audition. Et justement la publication de la vidéo est destinée à permettre à chacun de se faire une opinion.

  2. JM dit :

    Tellement compétent ce Monsizur BARROT, qu’il a voulu en son temps, privatiser littéralement la sécurité sociale… Heureusement que certain(e)s à gauche de sa droite lui ont fait comprendre que c’était peut-être pas possible…

  3. seb dit :

    Je trouve vos questions très intéressantes. Mais comprends aussi la réserve de M. BARROT. Car il est difficile de répondre à de telles questions.

    Prenons votre première question. Vous vous interrogiez sur l’attitude que pourrait avoir le Conseil Constitutionnel, s’il constatait suite à une saisie – vous parlez de la QPC mais je suppose que toute saisie peut mettre le CC dans une telle situation – que la loi incriminée est bien respectueuse de la Constitution, mais contraire à un traité. (Notamment à un traité européen)

    Je crois, pour commencer, qu’il faut rappeler que l’article 55, qui donne une place éminente dans la hiérarchie des normes au traité, mais aussi le préambule de 1946 – qui reconnaît que la France consent à respecter le droit international, dès lors que ce dernier vise à la défense de la paix dans le monde – font partie de la Constitution. Ne pas respecter un traité reconnu par la République – dès lors qu’il y a réciprocité dans les engagements – revient donc à violer la Constitution.

    Il me semble donc que l’on peut déduire de cela que, si le CC est saisi, il ne proclamer la constitutionnalité d’une loi qui serait contraire aux traités internationaux approuvés par la République française, et aux traités promouvant la paix dans le monde, agréés par la France. (La Constitution fait la distinction entre le régime politique (la République) et notre pays (la France) : je fais donc aussi la différence)

    Mais attention, à toute règle son exception. Si les traités, dans la hiérarchie des normes, sont supérieurs à la loi, ces derniers – notamment ceux européens (cf traité de Lisbonne) doivent respecter ce que le CC appelle « l’identité constitutionnelle » de la France. Les « traditions constitutionnelles » de la « France ». (Et pas seulement la « République ») Tout traité qui porterait atteinte à cette identité constitutionnelle serait illégal. Et donc ne pourrait être reconnu par la République française, et encore moins par la France. (Laquelle a des traditions constitutionnelles qui ne sont pas seulement républicaines)

    Par ex, un traité qui aurait vocation à atténuer voire à piétiner les principes inscrits dans la Déclaration de 1789 ne pourrait pas être reconnu par la France. C’est notamment en s’appuyant sur le fait que tout viol des dits principes entraînent l’inexistence de la Constitution (cf article 16) que la Convention a annulé les « droits » des princes allemands et de la Papauté sur des territoires de la Couronne de la France. (N’oublions pas que la DDHC est le chef d’œuvre qui a suivi la nuit du 4 août 1789)

    Par ex, un traité qui aurait pour but d’offrir la souveraineté de la France sur un plateau – suite à une prise de force, une contrainte exercée sur le constituant (originaire ou secondaire), etc. – à quiconque, serait lui aussi illégal. Ainsi, le traité de Brétigny, signé par Jean II dit le Bon, à Londres, et qui avait pour objet de donner aux Anglais la moitié du Royaume de France, fut il rejeté par les États Généraux, qui s’était réuni sous l’égide du régent Charles V. (Lequel avait reçu de Londres, une lettre de son père, où ce dernier expliquait avoir été contraint à la signature du traité) Après sa capture par les Espagnols, François 1er rejettera, lui aussi, tout engagement, au regard de la contrainte exercée sur sa personne. Et bien sur, dès 1420, Charles V dit le Victorieux, contestera la validité du traité de Troyes, au motif de son inconstitutionnalité au regard des Lois Fondamentales du Royaume. (Loi salique, hiérarchie dans la succession (à la mort de Charles VI, si ce dernier n’avait pas eu d’enfants mâles, c’est Charles d’Orléans qui aurait dû devenir roi de France. Puis Philippe de Bourgogne. Henri V d’Angleterre est très loin derrière), impossibilité pour Charles VI de déshériter son fils (puisque la Couronne de France appartenait à Dieu qui seul pouvait enlever celle ci à l’héritier du trône))

    Bref, je pense qu’à votre première question, on ne peut pas répondre totalement, car tout dépend de la situation rencontrée. Si le traité ratifié s’avère être conforme à la Loi, et notamment ne viole pas la DDHC prioritairement, puis les autres textes du bloc de constitutionnalité, je ne vois pas comment le CC pourrait reconnaître la constitutionnalité d’une loi contraire à un traité. (Au regard de la supériorité (reconnue par le préambule de 46) des traités internationaux sur les lois.)

    Sans parler du fait que le statut d’un traité est soumis à une condition supplémentaire (en plus de la libre expression d’un choix (il ne faut que le traité soit contraint) notamment) : la réciprocité des engagements.

    Après, faut il que le Conseil Constitutionnel exerce un contrôle de conventionnalité ? Et donc revienne sur sa jurisprudence de 1975 ?
    http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/root/bank_mm/pdf/pdf_cahiers/cccc7.pdf

    Je pense que oui. Mais dans de bonnes conditions. Je crois en effet qu’il convient de retrancher tous les traités ou accords bilatéraux, dont la supériorité par rapport à la loi demeure effectivement contingente, parce que logiquement liée à la condition de réciprocité, ce qui peut justifier pleinement que la jurisprudence de 1975 soit maintenue à leur égard. Ainsi, de quelques milliers, le total des engagements internationaux multilatéraux fondrait à quelques dizaines seulement, sans doute moins encore. Du coup, le contrôle de conventionnalité serait possible.

    Ensuite, le champ ainsi logiquement restreint ne laisserait subsister, pour l’essentiel, que quelques conventions majeures, au premier rang desquelles, bien sûr, la convention européenne des droits de l’homme. Or, force est de constater les efforts réalisés par la CJUE et la CEDH pour harmoniser le droit. C’est notamment vrai avec l’ex allemand. Devant les craintes perceptibles de la Cour constitutionnelle allemande, le CJUE et et la CEDH se sont efforcées de prendre en compte certaines spécificités nationales pour les inscrire au plan européen, voire international dans le cas de l’ONU. Autant dire que le contrôle de conventionnalité et le contrôle de constitutionnalité se confonde très souvent, sauf pour quelques articles notamment. La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme n’est elle pas inspirée par la DDHC et le préambule de 46 ?

    Reste, enfin, la question du droit communautaire dérivé. Si logiquement le CC a refusé de contrôler la loi au regard du droit communautaire dérivé, il est en revanche injustifiable qu’il se refuse à le faire dans le cadre du contrôle de constitutionnalité. D’une part parce que la France participe librement à l’aventure européenne, mais dès lors que les traités qu’elle ratifie, soient respectés par ses partenaires. Il n’est donc pas normal que le Conseil Constitutionnel se taise lorsque la Constitution est violée, en raison de l’excès de pouvoir, dont font preuve certaines institutions européennes. D’autre part, parce que le premier devoir du Conseil Constitutionnel, est de garantir aux justiciables la non violation du bloc de constitutionnalité, et en premier lieu de la DDHC de 1789. Si une directive – disons la directive anti discrimination – impose un modèle de société communautariste, alors que la France ne reconnaît aucune communauté, et cela depuis 1789, il est absurde que le CC persiste dans son silence. Parce qu’il fait partie de cette « force publique » instaurée pour « garantir les droits de la Déclaration » le CC n’a pas seulement des droits mais aussi des devoirs.

    C’est d’autant plus vrai que la majeure partie des objections techniques à l’exercice d’un contrôle de conventionnalité tombent d’elle même avec l’introduction du contrôle a posteriori. Le concret sécurise. Le temps d’examen est plus long. Et si l’on peut dire, le CC est déjà, et serait d’autant plus secondé dans son travail par la CEDH ou la CJUE. Le plus gros travail du CC consistant, in fine, non pas tant à vérifier qu’une loi respecte un traité – c’est le boulot de la CJUE et de la CEDH – mais que cette loi respectueuse d’un traité est également respectueuse des caractéristiques constitutionnelles purement françaises.

    Un ex – et j’attends toujours que le PS(E) l’invoque devant le CC (on est socialiste ou on ne l’est pas) – où la question pourrait se poser : la nouvelle directive BOLKENSTEIN. Les lois de transposition pourraient s’avérer « respectueuses de la directive » mais le seraient elles du « caractère social de la République » ?
    http://www.droitconstitutionnel.org/congresParis/comC1/JossoTXT.pdf

    Grâce à une telle reconnaissance, la CJUE et la CEDH, comme elles l’ont fait avec les caractéristiques spécifiques allemandes, pourraient reconnaître au niveau européen, des caractéristiques sociales qui s’imposerait à la loi du marché ! Mais encore faut il qu’il reste des socialistes – des vrais – en Europe !

  4. seb dit :

    Concernant le réglement des Assemblées, le CC s’y intérèsse déjà, comme en témoigne la décision du CC du 8 juillet 99.

    Le Conseil constitutionnel a en effet été saisi le 1er juillet 1999 d’une courte modification du règlement de l’Assemblée nationale, adoptée à la veille de la clôture de la session ordinaire. Si ses deux objets étaient distincts, ils présentaient comme caractéristique commune de tendre à
    résoudre des difficultés apparues à l’automne 1998 lors de la discussion de la proposition de loi sur le pacte civil de solidarité :
    - celle liée à l’organisation de la discussion de textes de cette importance le jour réservé par le règlement à un ordre du jour d’initiative parlementaire, c’est-à-dire le vendredi;
    - celle liée à la longueur des interventions prononcées à l’appui d’une motion de procédure.

    - Le premier objectif de la résolution était d’offrir un meilleur  » créneau  » à la séance réservée à un ordre du jour d’initiative parlementaire. À cet effet, la proposition de résolution initial prévoyait qu’alternativement aurait lieu, le mardi matin, soit la séance réservée à l’ordre du jour d’initiative parlementaire, soit la séance de questions orales sans débat. Un tel mécanisme aurait conduit à multiplier par deux le nombre de séances réservées à la  » plage parlementaire  » – puisqu’il n’en existe actuellement qu’une par mois – et corrélativement à diviser par deux le nombre de séances réservées aux questions orales sans débat, puisqu’il en
    existe aujourd’hui une par semaine.

    Une telle solution se heurtait à deux dispositions constitutionnelles explicites :

    - d’une part, le deuxième alinéa de l’article 48 de la Constitution qui dispose expressément qu’une séance par semaine au moins est réservée par priorité aux questions des membres du Parlement et aux réponses du Gouvernement;
    - d’autre part, le troisième alinéa du même article qui prévoit de manière tout aussi explicite qu’une séance par mois (et une seule) est réservée par priorité à l’ordre du jour fixé par chaque assemblée.

    Pour éviter une éventuelle censure, la commission des lois et, à sa suite, l’Assemblée ellemême, ont transformé l’alternance prévue, entre séance de questions et séance réservée à un ordre du jour d’initiative parlementaire, en une simple option.

    Comme le souligne la décision, il doit être clairement entendu que cette option ne saurait conduire à ce que plus d’une séance par mois soit réservée par priorité à un ordre du jour d’initiative parlementaire. Dans la pratique, la formulation retenue signifie que le mardi matin aura lieu la séance de questions orales sans débat, sauf la semaine où la conférence des présidents aura décidé d’inscrire un ordre du jour d’initiative parlementaire.

    Un tel système conduit, toutefois, une fois par mois, à supprimer la séance hebdomadaire de questions orales sans débat. Or, l’article 48 alinéa 2 de la Constitution exige qu’une séance par semaine au moins soit réservée aux questions.

    En rétablissant un article 135 dans le règlement, disposant que  » la conférence des présidents fixe la séance hebdomadaire consacrée aux questions des députés et aux réponses du Gouvernement « , l’Assemblée s’est conformée à cette exigence constitutionnelle.

    En effet, la formulation retenue – qui est celle de l’article 48 alinéa 2 de la Constitution – est suffisamment générale pour couvrir les questions orales sans débat et les  » questions au Gouvernement « , dont l’existence n’est pas prévue par le règlement. En pratique, la semaine où aura lieu la séance réservée à un ordre du jour d’initiative parlementaire, l’Assemblée aura le choix, soit de fixer à une autre date que le mardi matin la séance de questions orales sans débat si elle désire la maintenir, soit de se contenter des  » questions au Gouvernement « .

    Reprenant en outre le même raisonnement qu’en 1995 , le Conseil constitutionnel a précisé que, si chaque assemblée est tenue d’organiser une séance hebdomadaire au moins réservée par priorité aux questions des parlementaires, le Constituant n’a pas pour autant entendu imposer qu’une séance entière leur fût consacrée. La durée d’une séance n’étant pas en effet définie au niveau constitutionnel, il serait illogique de faire dépendre le contenu d’une obligation constitutionnelle d’une définition qui peut varier d’une assemblée à l’autre.

    - Le deuxième objet de la résolution ne soulevait aucune difficulté juridique. Alors que, jusqu’à présent, le temps de parole d’un député sur une motion de procédure n’était pas limité, les articles 91 et 108 du règlement ont été modifiés afin de limiter cette durée à une heure trente s’agissant de la discussion d’un texte en première lecture, à trente minutes en deuxième lecture et à quinze minutes pour les lectures ultérieures, sauf décision contraire de la conférence des présidents.
    Une telle disposition ne méconnaissait aucune règle de valeur constitutionnelle. C’est d’ailleurs ce qu’a déjà jugé le Conseil constitutionnel lorsqu’il a eu à connaître de dispositions comparables du règlement du Sénat, au demeurant beaucoup plus rigoureuses, puisque
    l’intervention à l’appui d’une motion de procédure y est en toute hypothèse limitée à un quart

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