Destitution du Président de la République

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Hier soir, en séance publique, nous débattions du projet de loi organique relatif à l’application de l’art. 68 de la Constitution.

Il s’agissait, j’en ai déjà parlé ici au moment du passage en commission, de combler un trou dans notre texte constitutionnel. En effet depuis une révision souhaitée par Jacques Chirac en 2007, notre loi fondamentale a intégré une possibilité de destitution du chef de l’Etat mais l’art. 68 qui la mentionne renvoie pour les modalités à une loi organique qui n’existe pour le moment pas.

Après 5 années d’attente, le gouvernement vient donc enfin de nous proposer de légiférer. Le travail, purement virtuel puisque personne n’envisage pour le moment l’utilisation de cette procédure, a pu se conduire dans la sérénité sous la responsabilité du député UMP Philippe Houillon.

Et donc logiquement les points de vue ont pu se rapprocher au point que nous pourrions voter mardi prochain ce texte. Les modalités imaginées nous semblent conforme à l’intention du constituant et parfaitement respectueuses des droits du parlement.

Durant la législature, je n’aurais rencontré ce climat que deux fois : sur la création de la Question Prioritaire de Constitutionnalité et hier. Ce n’est pas beaucoup pour une législature qui vit l’adoption de 240 lois !

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2 réponses à Destitution du Président de la République

  1. Bloggy Bag dit :

    Mon cher Jean-Jacques, je te soumets, via l’actualité, un nouveau sujet de réflexion http://wordpress.bloggy-bag.fr/2012/01/20/mega-upload-et-mega-probleme-pose-par-leconomie-numerique/

  2. seb dit :

    Bien heureux pour vous, M. URVOAS…Cependant, je ne comprends pas bien votre volonté d’adouber ce texte.

    Je m’explique : vous dites que « les modalités imaginées nous semblent conforme à l’intention du constituant et parfaitement respectueuses des droits du Parlement ».

    C’est oublier que les « intentions » du constituant (originaire comme secondaire) doivent être prises globalement – pour assurer la cohérence de la Constitution (!) – et que les « droits » du Parlement s’accompagnent de « devoirs » que ce dernier oublie bien souvent…

    Avant d’aller plus loin, auriez vous l’amabilité de ne pas parler du « gouvernement » pour désigner l’Exécutif ? Le « gouvernement » du pays…C’est la République. Le Gouvernement du pays…C’est l’équipe FILLON ! Le « parlement » peut être perçu comme une cour de Justice…Le Parlement est l’Institution représentative des Français sur le plan législatif. Les majuscules ont un sens, merci de le respecter…Conformément aux « volontés » du Constituant (à défaut de ses « intentions » souvent fluctuantes : je doute fort que les « intentions » du Constituant de 58 aient été les mêmes que celles des autres « constituants » secondaires !) !

    J’en reviens au sujet :

    En France, le pilier juridique du pays, c’est la DDHC. Et ce, pour une raison évidente : vos prédécesseurs de 1789, redoutant que Louis XVI reprenne l’avantage, ont inscrit un célèbre article qui créé un lien de subordination de toute Constitution (texte de loi en général, interne ou externe)…à ses articles !

    Traduction : si la DDHC est violée…Le pays n’a plus de Constitution. Autrement dit, les traités deviennent caducs, les Institutions ne sont plus légitimes et les lois sont (bien évidemment) illégales.

    Que dit la DDHC ?

    **Premièrement…Que la Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.

    Traduction : aucun agent public n’est au-dessus du contrôle des simples citoyens. Même le Président a des comptes à rendre à la Nation quant à ses objectifs et ses méthodes dans l’exercice de ses fonctions. Et si Louis XVI, roi de plein exercice (rappelons le) a dû lui en rendre, on ne voit pas pourquoi un Président de la République aurait droit à régime plus doux !

    **Que la garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

    Si l’on lit bien cet article, l’armée et la police – mais aussi l’administration – se révèlent indispensables ; mais elles ne peuvent jamais devenir des milices, bras armé d’un gang de bandits qui serait parvenu à s’emparer du pouvoir ou plus simplement agent de l’Etat mit au service d’un parti ou d’un homme, fut il Président. Les ordres de tels individus, arbitraires par nature, seraient toujours illégaux ; et en vertu de l’article 7, les agents de l’Etat se rendraient coupables par l’exécution de tels ordres. Ils auraient le devoir d’y résister.

    **Enfin, que nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l’instant : il se rend coupable par la résistance.

    Article fondamental, s’il en est, qui exprime le « principe de légalité ». Seule la loi peut décider si, quand, comment et pour quel motif les agents de l’Etat peuvent exercer la violence contre des citoyens. La loi est d’application stricte : si elle existe, elle possède sa pleine vigueur et l’enfreindre revient à commettre le délit de rébellion (article 433-6 du Code Pénal). En revanche, un ordre contraire à la Loi, ou même simplement non-conforme, c’est-à-dire privé de base légale, viole le « principe d’autorité » et un agent de l’Etat qui exécute un tel ordre se rend coupable d’une atteinte aux libertés individuelles (article 432-4 du Code pénal).

    L’excuse présentée par les nazis à Nuremberg (« Je n’ai fait qu’exécuter les ordres ») est irrecevable selon l’article 7 : même un soldat en service doit refuser d’exécuter un ordre exprès si cet ordre est contraire à la loi.

    Combinons cela avec l’article 5 : un agent de l’Etat qui exerce une violence physique contre une action qui n’est pas nuisible à la société agit de manière illégale. Peut-il, alors, accepter de partir au combat en Irak ? Peut-il expulser des « squatters » ? Peut-il procéder à une vérification d’identité ?

    1. A quel moment, dites moi, M. URVOAS…Les « intentions » du constituant – à savoir le Peuple Français – sont elles prises en compte ici, au regard des principes de 1789…Qui priment (faut il encore le rappeler) sur la Constitution elle même (comme le CC lui même le reconnaît) ?

    …Pour commencer, le constituant secondaire – le Parlement – ne prend pas en compte l’article 5 de la Constitution de 58 qui définit les « devoirs » du Président et permettent d’établir (concrètement) non pas s’il est « digne » de rester Président (ce qui n’est pas la question) mais s’il est en infraction avec ces derniers !

    Dans l’exposé du Ministre (des Sceaux) il est question de donner au Législateur le soin de définir les situations où le Président fait « preuve de manquement à ses devoirs de ses fonctions…DE MANIERE INCOMPATIBLE avec son mandat » !

    On notera déjà le coté « maladroit » de la formule. Parce que, de toute évidence, si le Président trahi les devoirs de sa charge, cela rend incompatible ses actes avec ledit mandat !

    N’était il pas, infiniment plus simple – et plus concret – de définir les « manquements à ses devoirs dans l’exercice de ses fonctions » de la manière suivante : « manquements à ses devoirs constitutionnels définis dans l’article 5 de la Constitution » ? A savoir garantir la Constitution – et par là même la DDHC – et les traités ?

    2. Comment le citoyen lambda est il supposé « résister » à des « ordres arbitraires » d’un Président qu’il ne peut poursuivre en es qualité ? Ou qu’il ne peut atteindre…Parce que membre du Gouvernement ou conseiller présidentiel ?

    S’il est tout à fait convenable et normal, je dirai, que le Président soit protégé pour les actes commis avant son mandat – dès lors qu’il ne s’agit que de délits mineurs : imaginons le cas d’un Président qui tuerait son épouse et attendrait son élection (réussie) pour la découverte du corps : on ne pourrait pas le destituer puisqu’il n’aurait pas fait preuve de manquement à ses devoirs constitutionnels. Son immunité le protégerait donc, même en cas de crime ? – peut on passer outre ses victimes collatérales ?

    Certes, le citoyen peut « casser » certaines décisions, en passant par le CC. Mais est ce bien normal que ce soit le contribuable – et non le Président (en sa qualité de garant) – qui soit contraint de payer les négligences de…Son serviteur ?

    Le Président – il faut le rappeler – a pour mandat essentiel, non pas de gouverner, mais bien d’assurer la garantie des droits. Dès lors qu’il ne le fait pas, il doit être sanctionné. Par le biais politique, via une destitution certes, mais une sanction pécuniaire serait beaucoup plus utile.

    Quand un chef d’entreprise ne respecte pas la législation, il est poursuivie par ses employés – lui, pas son entreprise en tant que telle – devant les tribunaux. Parce que, dans les contrats de travail, une obligation de garantir aux salariés le respect de leur droit est inscrite. Laquelle obligation, si elle n’est pas respectée, donne droit aux salariés de le poursuivre et de ne plus se sentir subordonnés à ses décisions.

    Idem dans l’enseignement et nombre de professions. J’irai même à dire, même si les choses sont un peu différente, qu’une sanction s’applique sur les élus, s’ils sortent du chemin. A tort ou à raison, cela se discute, mais il y a néanmoins possibilité de sanctionner. Politiquement mais pas seulement.

    Le seul qui n’a pas cette possibilité de se retourner contre le « garant » c’est…Le citoyen ! Que ce soit, d’ailleurs, sur le plan européen – où l’on viole les traités à tout va, et comme un citoyen lambda ne peut poursuivre sans un « intérêt personnel » et je ne sais quoi d’autre – ou national.

    Si, demain, le Président décidait d’assassiner la moitié des Français – comme le fit Charles IX – il aura droit à la même immunité que le monarque des guerres de religions. Un « crime » n’étant pas « incompatible » avec l’exercice de ses fonctions ! Aucun citoyen n’aura la possibilité de l’envoyer devant les tribunaux – pour génocide – pas plus qu’hier les gens de Lyon ne pouvaient invoquer la DDHC pour sanctionner les auteurs de la « Terreur » (et ses conséquences)…Et les parlementaires seront tout aussi désarmés, puisque tuer le Peuple Français n’entre pas dans les « devoirs constitutionnels » du Président !

    Le seul « moyen » pour éviter pareil désastre – fantasme sans doute aujourd’hui, mais demain ? Imaginait on, en 1789, que Lyon verrait ses habitants périr ? Ou la Vendée génocidée ? Sans parler des années 1793 où nombre de parlementaires allèrent rejoindre la guillotine – serait que l’on précise le droit pour tout citoyen (ou ses représentants) de considérer comme arbitraires tout texte ne répondant pas à la définition de la loi par la DDHC et que l’on donne aux citoyens la possibilité de sanctionner toute personne exerçant ou ayant donné à exercer des actes arbitraires. Institution ou pas.

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