Hôpitaux en danger

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breis.jpgHier matin, à Pontivy, réunion des socialistes bretons. Cette structure régionale présidée par Bernard Poignant s’est longuement intéressée à la situation des hôpitaux.

Sur le seul plan de la méthode suivie par Antoine Perrin directeur de l’Agence Régionale de l’Hospitalisation, on peut parler de gestion calamiteuse de ces dossiers. Ses annonces brutales ont braqué tout le monde et leur cumul donnent le sentiment d’une attaque frontale contre les hôpitaux du Finistère, toutes catégories confondues.

Certes, ce directeur applique des consignes nationales, mais il paraît aussi évident qu’il gère très mal la situation, voire qu’il provoque la crise par une succession d’initiatives sans avoir réfléchi aux moyens de gérer les problèmes. Pour en avoir parlé avec d’autres parlementaires dans d’autres régions, la démarche y semble plus adaptée puisqu’elle repose sur le dialogue avec les élus.

Sur le fond, les hôpitaux publics sont les parents pauvres des politiques des différents gouvernements de droite qui se sont succédé depuis 2002 au point de connaître une situation critique. Nous avons rappelé que l’hôpital public, parce qu’il est ouvert 24h sur 24h, parce qu’il pratique des actes médicaux non programmés, parce qu’il répond aux insuffisances du tissu médical, parce qu’il assure des fonctions de recherche et de formation, et parce que, en un mot, ses activités et ses patients ne sont pas les plus rentables ni les plus aisés, nécessite des moyens structurels à la hauteur de ces missions.

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6 réponses à Hôpitaux en danger

  1. René dit :

    Après être passé par http://www.lafermeenville.fr je crois que vous avez raison de vous inquiéter de l’avenir des hopitaux

  2. vero dit :

    bonjour monsieur le député ,

    désolé de revenir vers vous de cette manière mais , ayant fait le choix de vous accorder mon suffrage lors des élections législatives, je ne puis supporter la démagogie dont vous faites preuve sur ce dossier.

    car en effet:

    1) la question de la démographie médicale est un choix politique qui date d’environ 20 ans , à savoir la baisse du numerus clausus en fac de médecine.comment osez vous affirmer qu’il s’agit d’une politique de droite alors même que le ps au gouvernement l’a validée.

    il s’agit de connaitre ses dossiers sauf à faire de la communication politique.

    2) vous indiquez que les pbs des hopitaux sont postérieurs à 2002.avez vous oubliez , ou faites vous semblant , les ravages de la loi sur les 35 heures dans les dits hôpitaux.

    en gros, 10% de temps médical en moins alors que dans le même temps le nombre de médecins en formation ne cessait de diminuer comme celui des infirmières.remarquble gestion prévisionnelle!

    la dessus, votre parti n’aurait aucune responsabilité?

    3) le choix au combien évident de recentrer les hopitaux locaux sur des missions de proximité ( médecine, consultations externes, smur) est validé depuis longtemps par les experts sérieux , y compris ceux du ps ( c evin)
    quelle est votre position éclairée sur le sujet? ou mieux encore comment faites vous fonctionner les hopitaux sans médecins?

    4) la santé publique représente 11% du pib en france , ce qui la place au 3 rang mondial pour des résultats en termes de santé publique inférieurs( ex: taux de mortalité infantile)

    quelle est votre réponse sérieuse sur le sujet?

    glogalement, les non- positions du ps et son  » ya

    Réaction de JJU :
    Je suis loin d’être un spécialiste et je dénonçais surtout les méthodes du directeur de l’ARH. Mais comme vous m’interrogez sur plusieurs points je me fais un devoir de tenter de vous répondre.
    Pour ce qui concerne les questions de démographie médicale, il faut rappeler que la baisse du numérus clausus a été enclenchée ,à l’époque, à la demande même de cerrains syndicats médicaux qui craignaient que l’augmentation des effectifs se traduise par une concurrence professionnelle très forte et qui voulaient par ce biais préserver leurs revenus. A l’époque également, les experts de tous bords prônaient la réduction des effectifs des médecins pour éviter une hausse des dépenses en freinant l’offre. Depuis, il y a eu une évolution sociologique importante avec une aspiration des médecins à ne plus être continuellement à la tâche, les effets des départs en retraite, et il faut donc adapter ce numérus clausus. On rappelera que c’est sous le gouvernement de Lionel Jospin que ces premières mesures ont été prises , comme pour l’augmentation des quotas dans les instituts de formation des infirmiers. La question aujourd’hui, et la responsabilité de la droite est écrasante sur ce point est qu’il ya une mauvaise répartition des médecins:
    -mauvaise répartition selon les spécialités (on manque de gynécologues, d’anesthésistes, d’ophtalmologues);
    -mauvaise répartition géographique dans le formation(il faut absolument parvenir à définir les quotas d’internes par régions) et la répartition des médecins (le débat est il est vrai ouvert au sein du PS entre la prise de mesures incitatives ou désincitatives à l’installation, il faudra le trancher car les inégalités d’accèsa aux soins sont de plus en plus marquées);
    -mauvaise politique de rémunération des professionnels, les chirurgiens, les radiologues, les cancérologues ,les psychiatres quittent l’hôpital pour le privé car bénéficiant de rémunérations deux voire, trois fois supérieures; cela est couplé avec un soutien à l’expansion des groupes de cliniques qui ratissent le territoire et vident les hôpitaux de beaucoup de leurs médecins. Une politique de régulation des implantations des établissements de santé et une politique de rémunération des médecins adaptée permettrait de rééquilibrer les choses dans l’intérêt des usagers.

    Comme d’habitude il est fait le procès en sorcellerie des 35H. Il suffit d’interroger les personnels soignants pour comprendre leur attachement à cette conquète sociale. C’est justement parce qu’il y avait à mettre en place les 35H que le gouvernement Jospin a augmenté les quotas dans les écoles d’infirmiers. Concernant le temps médical, on rappelera qu’au delà de la mise en place des 35H, ce sont les directives européennes ‘(au demeurant parfaitement justifiées)de limitation de la durée hebdomadaire du travail qui ont aussi joué. Les jeunes médecins hospitaliers ont des aspirations différentes de leurs âinés, ne pas les avoir pris en compte aurait encore plus fragilisé l’hôpital. Il faut mentionner qu’à l’hôpital peu de médecins sont à 35H comte tenu des gardes qu’ils assurent. Alors attention aux accusations de portée idéologique. Se souvient-on que c’est une certain Gilles de Robien qui avait négocié dans sa mairie, à Amiens les 32H ,hebdomadaires?

    Sur l’organisation hospitalière, le maillage des établissements est essentiel. Que disent vos experts sur les mouvements de concentration de l’offre dans les cliniques qui font qu’ii n’y aura plus d’accès aux soins dans certaines disciplines sauf à faire des déplacements importants (avec un risque d’inflation des coûts des soins)? Que disent-ils sur le dépassements d’honoraires qui font que des gens sont obligés de puiser sur leurs économies pour se faire opérer dans le privé?
    Le bon exemple de ce maillage est jusqu’à présent la coopération entre Quimper et Douarnenez où des activités chirurgicales de proximité sont maintenues en mutualisant les ressources médicales. On a fait le contraire à Carhaix.
    Par ailleurs les moyens de télémédecine permettent ce maillage.
    Sur la question des allogreffes de Brest on aurait pu procéder ainsi, en mettant en relation les équipes médicales de Brest , Rennes et Nantes en utilisant des protocoles et des standards de bonne pratique communs par transmission d’images, visio conférences. Cela aurait évité l’arrachement d’enfants à leur famille. Oui les hôpitaux doivent évoluer, s’adapter,mais il faut le faire autour d’objectifs de santé publique partagés et non par la politique du baton qui ne marche pas et au contraire bloque les évolutions nécessaires.

  3. vero dit :

    pardon je finis

     » son ya qua faut que » vont finir par faire de moi une non électrice.

  4. vero dit :

    bonjour ,

    merci pour votre réponse .voici les miennes:

    1) concernant la répartition territoriale et par spécialités des médecins, pouvez vous m’expliquer pourquoi le ps a soutenu la grève des internes , dont le principal motif était l’obligation d’un maillage du territoire?

    2) concernant les 35 h, je ne critique absolument pas le principe de la rtt , ce que je dis c’est que le gouvernement jospin a fait preuve d’incurie sur ce dossier.augmentation des numeus clausus certes en 2002 mais savez vous qu’il faut 12 ans pour former un spécialiste?
    on fait comment en attendant?

    d’autre part , ne vous y trompez pas, l’augmentation des numerus clausus tant en fac de médecine qu’en ifsi, ne fait au mieux que compenser les départs en retraite.( 25% de la profession partira en retraite sous 10 ans)

    3) concernant l’organisation hospitalière, ok sur le nécessaire aménagement du territoire mais:

    - quelles mesures préconisez vous pour contraindre les médecins à travailler par exemple à carhaix? la coercition? un peu de courage monsieur le député!
    - que répondez vous à l’argument de sécurité? ( que je trouve très fondé), personnement ma confiance va plus dans un chirurgien qui opère très souvent que dans un professionnel qui opère peu.

    Réaction de JJU :
    Après votre réponse, je pense qu’on peut conclure notre débat en rappelant :
    -Que la question de la démographie ,à la baisse, des médecins ne se posait pas aux yeux de nombreux experts avant le début des années 2000. C’est effectivement sous le gouvernement de Lionel Jospin que la question a commencé à être soulevée, et à cette époque le gouvernement a réagi.
    -Vous évoquez le sujet de la liberté d’installation des professionnels de santé. Je crois avoir eu l’honnêté de dire que cela a fait débat au PS et je pense personnellement qu’il faudra à l’avenir, pour les médecins notamment, proposer une sorte de contrat individuel comportant un « paquet » de dispositions incitatives à l’installation et désincitatives à cette installation dans les zones de surdensité médicale.
    - Proximité, qualité, sécurité. C’est effectivement l’enjeu des arbitrages à opérer, pour les hôpitaux. Mais il faut procéder à ces arbitrages en informant mieux en amont, et en utilisant la méthode de la concertation, même si l’Etat doit prendre ensuit ses responsabilités. Il faut tenir compte dans ce contexte de la situation géographique des hôpitaux, et ceux de Carhaix et Redon ont un rôle important à jouer pour garantir l’accès aux soins.

  5. vilamot dit :

    Monsieur le Député,

    En tant que praticien hospitalier, chef de service d’Endocrinologie Diabétologie
    à l’ Hôpital d’Albi et conseillère municipale, liste Gauche Unie et Citoyenne, à Albi,
    je souhaiterais attirer toute votre attention sur le volet hôpital de la réforme Hôpital Patient Santé Territoire.
    Comme vous le savez, cette réforme vous sera présentée à partir du 10 février.
    Elle aura de graves conséquences sur les hôpitaux publics et, à travers eux, sur la santé des Français.
    Vous trouverez ci-dessous un résumé que j’ai préparé pour le Conseil municipal
    et un texte que j’ai écrit pour expliquer la situation.
    J’espère que vous voudrez bien en prendre connaissance et qu’ils vous convaincront de la
    réalité de la menace et de l’ampleur des dégâts que cette réforme entraînera.
    En vous remerciant, je vous prie d’agréer, Monsieur le Député, mes salutations les plus respectueuses.

    Dr Béatrice Vilamot
    Service d’endocrinologie
    Hôpital d’Albi
    22, bvd Sybille
    81013 cedex 09

    RESUME
    Le projet Hôpital, Patient, Santé, Territoire est actuellement présenté aux députés.
    Il fait partie d’un plan pour réduire la part de l’hospitalisation publique en France afin de diminuer l’engagement de l’Etat dans la prise en charge des besoins de santé.
    Pour forcer les hôpitaux à se restructurer, c’est-à-dire à fermer de nombreux services de spécialité, l’Etat utilise des pressions financières et met en place une réforme profonde du fonctionnement de l’hôpital.

    Dans un premier temps, l’Etat commence par supprimer le budget global et demande aux hôpitaux de régler la note. Instantanément, 90% des hôpitaux se retrouvent en déficit. Soulignons que le montant de la totalité du déficit de tous les hôpitaux français en 2007 était équivalent à celui de l’argent versé par l’Etat à Bernard Tapie, au terme de la procédure d’arbitrage concernant le Crédit Lyonnais (350 millions d’euros).
    Dans un deuxième temps, à partir de 2008, l’Etat applique à 100% le nouveau mode de financement, la tarification à l’activité, alors que dans les autres pays d’Europe, la part de la tarification à l’activité ne dépasse jamais 50% du budget hospitalier. Le passage à la tarification à l’activité entraînera une baisse de 30% des recettes des hôpitaux. Le déficit des hôpitaux va s’accroître.
    Puis, l’Etat impose aux hôpitaux d être tous à l’équilibre budgétaire d’ici 2012.
    Les hôpitaux n’auront comme solution que de diminuer les dépenses de personnel qui représentent 70% de leur budget. Pour arriver à l’objectif fixé par l’Etat, il faudra supprimer 20 000 emplois dans les hôpitaux français. Cette suppression d’emplois entraînera la fermeture de nombreux services puisqu’il faut des soignants pour soigner.

    Le projet HPST arrive à point nommé avec la restructuration en communauté hospitalière et en groupement sanitaire pour faire croire aux Français que l’offre de soins sera équivalente.
    Avec les communautés hospitalières de territoire, (plusieurs hôpitaux de différentes villes) le patient n’aura pas forcément accès à toutes les spécialités dans l’hôpital de sa ville. Il devra faire des Km pour aller les chercher dans d’autres villes.
    Avec les groupements sanitaires, (regroupant hôpitaux, cliniques et médecins libéraux) certaines spécialités n’existeront plus qu’en privé. Le patient ne sera plus sur de pouvoir accéder à des consultations et des interventions sans dépassements d’honoraires pour toutes les spécialités. Il ne sera plus assuré de ne pas faire l’avance des frais.
    Avec la mise en place du directoire à la tête de chaque hôpital et la transformation du Conseil d’administration en conseil de surveillance, tous les pouvoirs sont confiés au directeur. Face au pouvoir gestionnaire, il n’y a plus aucun contre pouvoir :
    - ni médical : Or les médecins hospitaliers ont eu, jusqu’à présent, pour principe fondamental d’assurer la qualité des soins pour tous les patients, sans discrimination, et donc sans trier les patients selon qu’ils rapportent de l’argent à l’hôpital ou non.
    -ni des Elus : Or, les élus locaux sont très attachés à garantir l’égal accès à des soins de qualité pour la population locale.
    Ce projet de loi fait sauter deux verrous de protection de la santé des citoyens français.

    En réalité, la fermeture de nombreux services de spécialité à l’hôpital aboutira à une importante diminution des lits d’hospitalisation et des consultations de spécialistes. Comme en Angleterre, les Français devront attendre des mois pour se faire soigner. Comme aux Etats-Unis, certains renonceront à se soigner, faute de moyens financiers, laissant leur pathologie s’aggraver et entraîner des complications qui seront beaucoup plus coûteuses, à terme, non seulement en soins, mais aussi en incapacités de travail, transitoires ou définitives. Comme au Japon, ou 250 services hospitaliers ont été fermés depuis 4 ans, les cas de décès pour faute de prise en charge se multiplieront. Près de Kobe, par exemple, un homme gravement blessé dans un accident de vélo est mort dans une clinique après avoir été refusé par 14 hôpitaux.
    Dans son discours du 17 avril 2008 à Neufchâteau, le Président de la République explicite très bien l’hôpital qu’il prépare pour les Français :
    « J’appelle l’hôpital à faire ce double mouvement : recentrage sur […] la phase ase aigue de la maladie (c.a.d les urgences ndlr) et reconversion vers la prise en charge du grand age et de la dépendance. »

    TEXTE COMPLET
    Le projet Bachelot donne les moyens légaux au gouvernement de démanteler l’hôpital public. Il fait partie d’un plan pour réduire la part de l’hospitalisation publique en France afin de diminuer l’engagement de l’Etat dans la prise en charge des besoins de santé.
    Pour forcer les hôpitaux à abandonner des spécialités et à fermer des services, le gouvernement utilise des pressions financières.
    Dans un premier temps, en 2007, l’Etat commence par supprimer le budget global et demande aux hôpitaux de régler la note. Instantanément, 90% des hôpitaux se retrouvent en déficit. En agissant ainsi, l’Etat fait en sorte que les hôpitaux français deviennent un problème, alors que, pour la population, ils sont une solution. (cf. Encadré 1)
    Dans un deuxième temps, à partir de 2008, l’Etat applique à 100% le nouveau mode de financement, la tarification à l’activité, alors que dans les autres pays d’Europe, la part de la tarification à l’activité ne dépasse jamais 50% du budget hospitalier.
    La Fédération Hospitalière de France a calculé que le passage à la tarification à l’activité entraînera une baisse de 30% du budget des hôpitaux. (cf. Encadré 2)
    Ecoutons Nicolas Sarkozy : « J’attends de la modernisation de la gestion de l’hôpital public des résultats concrets pour les finances publiques. Ces mesures doivent permettre aux hôpitaux d’être tous à l’équilibre d’exploitation d’ici 2012. »
    Les hôpitaux ont déjà fait les économies qu’ils pouvaient faire sur les dépenses d’investissement et de fonctionnement. Durant des années, ils se sont efforcés de réduire leurs coûts, avec un certain succès, puisque la part des dépenses de l’assurance maladie consacrées à l’Hôpital public a diminué de 42% à 34% en 20 ans.
    Devant l’ampleur des nouvelles économies que l’Etat Français leur demande, ils n’auront comme unique solution que de diminuer les dépenses de personnel qui représentent 70% de leur budget. La Fédération Hospitalière de France a calculé que pour arriver à l’objectif fixé par l’Etat, il faudra supprimer 20 000 emplois dans les hôpitaux français.
    C’est l’équivalent d’un plan social qui commence, dés maintenant, à être mis en œuvre dans les hôpitaux de France (suppression de 800 emplois sur 4000 à l’hôpital du Havre par exemple).
    Le projet Bachelot impose une nouvelle carte hospitalière publique, laminée et appauvrie programmant des fermetures de nombreux services de spécialité à l’hôpital.
    Avec les communautés hospitalières de territoire, le patient n’aura pas forcément accès à toutes les spécialités dans l’hôpital de sa ville. Il devra faire des Km pour aller les chercher dans d’autres villes.
    Avec les groupements sanitaires, certaines spécialités n’existeront plus qu’en privé.
    Le patient ne sera plus sur de pouvoir accéder à des consultations et des interventions sans dépassements d’honoraires pour toutes les spécialités. Il ne sera plus assuré de ne pas faire l’avance des frais.
    Avec la mise en place du directoire à la tête de chaque hôpital et la transformation du Conseil d’administration en conseil de surveillance, tous les pouvoirs sont confiés au directeur. Face au pouvoir gestionnaire, il n’y a plus aucun contre pouvoir :
    - ni médical : Or les médecins hospitaliers ont eu, jusqu’à présent, pour principe fondamental d’assurer la qualité des soins pour tous les patients, sans discrimination, et donc sans trier les patients selon qu’ils rapportent de l’argent à l’hôpital ou non.
    -ni des Elus : Or, les élus locaux sont très attachés à garantir l’égal accès à des soins de qualité pour la population locale.
    La réforme Bachelot fait sauter deux verrous de protection de la santé des citoyens français. (cf. Encadré 3)
    Au final, les spécialités « rentables » dans les endroits « rentables » seront récupérées par les cliniques privées, créant une situation de monopole privé, enrichissant les actionnaires des cliniques avec l’argent de la Sécurité Sociale. L’hôpital public se « recentrera sur les urgences, le grand age et la dépendance » dixit Nicolas Sarkozy et se paupérisera pour retourner à l’état d’hospice. Nicolas Sarkozy menace : « le refus de la réforme conduira à la fermeture des hôpitaux. »
    Tout cela, sous couvert de la qualité des soins et de la sécurité. La fermeture de services à l’hôpital diminuera l’offre de soins publique. Les patients qui ne pourront pas payer de dépassements ou faire l’avance des frais diffèreront leurs soins ou, pire, y renonceront, faute de moyens, comme, par exemple, aux Etats-Unis. De plus, la réforme propose deux cadres d’exercice aux, praticiens hospitaliers, statutaire et contractuel. Cette modification du statut sera, elle aussi, préjudiciable à la qualité des soins. Le cadre statutaire avec part variable fait référence à la tarification à l’activité.
    La tarification à l’activité déclare, de façon profondément choquante, par exemple, plus rentable, donc préférable, (« bien gérer, c’est bien soigner » Roselyne Bachelot) d’amputer un diabétique plutôt que de le soigner médicalement, lors d’une hospitalisation plus prolongée, sans acte opératoire. Aux Etats-Unis, les diabétiques ont deux fois plus d’amputations, de cécité et de dialyse qu’en France. Ce n’est plus « travailler plus pour gagner plus, mais amputer plus pour gagner plus. »
    Si l’on veut avoir une idée de l’avenir que l’Etat Français réserve à ses hôpitaux, on peut consulter le rapport du Conseiller social de l’Ambassade de France au Royaume Uni, en annexe du Rapport Larcher. Au terme « d’un exercice de régulation budgétaire d’une rare violence » 36 hôpitaux restaient en déficit, 18 ont été considérés comme « sauvables » et ont bénéficié d’un délai. Les 18 autres ont, soit été fermés, avec vente des locaux, soit restructurés, avec fermeture de services, déplacement de personnel, licenciement de personnel. Le rapporteur conclut : «l’exemple anglais peut être une boite à idées fort intéressante pour affronter les problèmes similaires que nous rencontrons avec les hôpitaux publics français. » La politique hospitalière menée ces dernières années par l’Etat et le projet Bachelot nous montrent qu’il a été entendu. (Encadré 4)
    Laissons le mot de la fin à Nicolas Sarkozy : « l’hôpital, c’est un condensé de la société française […].Beaucoup des valeurs de notre société se retrouvent de façon aigue à l’hôpital. »Toute la question est de savoir quelles valeurs nous voulons pour notre société. En cela, la réforme de l’hôpital ne concerne pas seulement l’hôpital, mais tous les Français.
    A travers le projet Bachelot, Nicolas Sarkozy déclare la guerre aux hôpitaux français.
    Il piétine les valeurs de solidarité, de non discrimination, de dévouement du service public. Il s’oppose à l’un des principes fondateurs de la Sécurité Sociale : « L’égal accès aux soins pour tous ». Ce que l’Etat Français a fait au sortir de la deuxième guerre mondiale, alors que ses finances étaient exsangues, il devrait y renoncer en 2009, le sacrifier au nom de la prétendue valeur « rentabilité » ? Si l’on ne réagit pas, après le passage du Tsunami Bachelot, en 2012, beaucoup de services hospitaliers, jugés non rentables, auront disparu, mais « non rentables » pour qui ? Pour l’hôpital. Mais l’hôpital ne fonctionne pas pour lui, l’hôpital est au service de la population. Son action évite que des patients renoncent à se soigner, laissant leur pathologie s’aggraver et entraîner des complications qui seront beaucoup plus coûteuses, à terme, non seulement en soins, mais aussi en incapacités de travail, transitoires ou définitives.
    « Une guerre idéologique oppose les quantificateurs, avec leur prétention croissante à régenter l’existence humaine dans tous ses aspects, et ceux qui ne plient pas devant la dictature des nombres. Le fanatisme du chiffre, ce n’est pas la science, c’en est la grimace. » Jacques Alain Miller.
    Le 5 février 2009,
    Dr Béatrice Vilamot,
    Chef de service d’endocrinologie diabétologie, Hôpital d’Albi.
    Encadré 1

    Avec la suppression brutale du budget global, 90% des hôpitaux se retrouvent instantanément en déficit.
    Cette situation qui parait incroyable est bien réelle et elle était tout à fait prévisible.
    En 1983, le budget global est fixé une fois pour toutes. L’Etat décide de fournir, pour chaque hôpital, une enveloppe équivalente aux dépenses de l’année précédente (1982)
    Pendant 24 ans : l’enveloppe est restée quasi identique d’une année sur l’autre (quelques % d’augmentation chaque année).
    Pendant ce temps-là : la médecine a changé, l’hôpital a évolué :
    - la durée moyenne de séjour a diminué de trois semaines à cinq jours.
    - il y a eu une très forte augmentation du nombre de patients en consultation, aux urgences, en hospitalisation.
    - la médecine a fait des progrès, l’hôpital a augmenté ses moyens en techniques d’investigation et en techniques de soins.
    -l’Etat a attribué de plus en plus de missions de service public à l’hôpital sans contrepartie financière suffisante : médecine pénitentiaire, SAMU, accueil des plus démunis, lutte contre l’exclusion.
    - il a fallu plus de personnel hospitalier pour prendre un charge tous ces patients et mettre en œuvre toutes ces techniques.
    -Une succession de mesures diverses allant de la RTT à une multitude de normes aux conséquences particulièrement lourdes n’ont pas été financées à leur coût réel.
    D’année en année, les dépenses ont augmenté, mais non les recettes. Chaque année, les comptes étaient équilibrés en reportant le déficit sur l’année suivante, cela s’appelait le report de charges. La dette s’est creusée, sans pouvoir rien n’y faire.
    En 2008, l’Etat somme les hôpitaux de payer tous les reports de charge accumulés.
    L’état aurait pu choisir de « remettre les compteurs à zéro », puisqu’il changeait les règles de financement. Ou bien, il aurait pu choisir d’étaler le remboursement sur des dizaines d’années. Il ne l’a pas fait.
    Le problème de fond se situe dans la mise en demeure, faite par l’Etat Français aux hôpitaux publics, de rembourser et, de surcroît, très rapidement (d’ici 2012), une partie de l’argent nécessaire à leur fonctionnement qu’il ne leur a pas donné, mais, finalement, seulement prêté, pendant ces 24 dernières années.
    A titre de comparaison, le montant de la totalité du déficit de tous les hôpitaux français est équivalent à celui de l’argent versé par l’Etat à Bernard Tapie, au terme de la procédure d’arbitrage concernant le Crédit Lyonnais (350 millions d’euros).
    En agissant ainsi, l’Etat décide sciemment de placer ses hôpitaux en situation de faillite (ce qui compte, ce sont les actes, pas les paroles).

    Encadré 2
    La tarification à l’activité à 100% appauvrira les hôpitaux.
    L’application de ce nouveau mode de financement va considérablement aggraver leur déficit.
    Dans le principe, pour chaque patient est donné selon sa pathologie, un certain nombre de points correspondant à de l’argent. En pratique, la tarification à l’activité privilégie la comptabilisation des actes techniques au détriment de l’écoute ou des examens cliniques approfondis. Elle favorise les hospitalisations courtes et les pathologies simples. C’est précisément le profil des patients pris en charge en cliniques privées et l’exact contraire des patients pris en charge à l’hôpital public.
    Le rapport du Comité d’éthique de 2007(2) conclut « qu’elle conduit à considérer comme non rentables beaucoup de patients pris en charges à l’hôpital public. »
    L’application du même mode de financement aux hôpitaux publics et aux cliniques privées lèsera l’hôpital.
    L’hôpital public doit assurer ses missions de service public, (accueil de tous les patients sans discrimination, médecine pénitentiaire, SAMU, accueil des plus démunis, lutte contre l’exclusion, accueil des urgences 24 heures sur 24), ce qui n’est pas le cas des cliniques privées, même dans le projet Bachelot qui prévoit seulement qu’elles pourront choisir certaines missions, mais n’en n’auront nullement l’obligation.
    L’hôpital public ne choisit pas ses patients à la différence des cliniques privées qui privilégient, comme c’est leur droit le plus strict, les activités rentables dans les endroits rentables. Les actionnaires des cliniques exigent un taux de rentabilité financière de 15 à 20%
    L’hôpital public n’accueille pas les mêmes patients que les cliniques.
    .Tous les patients qui nécessitent plus de temps pour être soignés sont « moins rentables ». Or, l’hôpital les soigne dans leur grande majorité : pathologies plus variées
    (pour caractériser 80% des patients soignés dans les établissements, il faut trois fois plus de diagnostics différents à l’hôpital qu’en clinique) et diagnostics plus complexes et plus graves, (les 50 diagnostics les plus lourds représentent 70% des patients hospitalisés en public, les 50 diagnostics les moins lourds représentent 70% des patients hospitalisés en privé), 90% des urgences (un patient hospitalisé en urgence représente un surcoût de 63%.), 97% des patients atteints d’Alzheimer, 80% des patients de plus de 75 ans hospitalisés en médecine, majorité des patients les plus démunis( ils restent plus longtemps et ils présentent des pathologies plus lourdes), 90% des patients de réanimation, 100% des maladies rares, 96% des maladies psychiatriques (1 million 300 000 patients en public, 52000 en privé), 80% de la pédiatrie, 100% de la réanimation néonatale.(3)
    Le personnel des Hôpitaux Publics de France est fier d’accueillir et de soigner tous ces patients. Il est très attaché à remplir toutes ses missions de service public. Il veut simplement qu’on lui donne les moyens de continuer.
    D’autres différences existent entre le public et le privé (salaires des médecins hospitaliers intégrés dans les coûts, contrairement au privé, enseignement, recherche, etc.).
    L’Etat est parfaitement conscient des conséquences de l’application à 100% de la tarification à l’activité puisque la Fédération Hospitalière de France, organisme rigoureux et reconnu sur le plan international, l’en a informé publiquement à plusieurs reprises.

    Encadré 3
    Avec la mise en place du directoire et du conseil de surveillance, face au pouvoir gestionnaire, il n’y a plus aucun contre pouvoir :
    - ni médical : au sein du directoire, le directeur est le président. Le président de la CME, élu par la CME, en est le vice-président. C’est le directeur qui nomme les 3 autres membres du directoire parmi les médecins, pharmaciens et odontologistes de l’hôpital. On peut raisonnablement prévoir qu’à moins d’être masochiste, le directeur nommera des collaborateurs ayant les mêmes analyses de la situation et les mêmes objectifs que lui. Rappelons que Nicolas Sarkozy fixe ainsi la mission du directeur : « le directeur doit diriger l’hôpital en maîtrisant les ressources. »
    De plus, tous les médecins de l’hôpital sont nommés et démis par le directeur. C’est la fin de l’indépendance médicale.
    - ni des Elus : le conseil d’administration est supprimé, remplacé par un conseil de surveillance qui n’a plus aucun pouvoir décisionnel. Le maire n’est plus le président de ce conseil.
    La réforme Bachelot fait en sorte de réduire au silence les médecins hospitaliers et les Elus locaux.

    Encadré 4.
    Rapport du Conseiller social de l’Ambassade de France au Royaume Uni, en annexe du Rapport Larcher.
    Ce rapport décrit comment les hôpitaux anglais ont été forcés de se restructurer.
    On y lit, médusé : « dans un premier temps, amputation des crédits importante, suppression de 23 000 postes par non renouvellement des contrats temporaires et gel des recrutements, fermeture de la moitié des maternités et des services d’urgence (en 2006, fermeture de 3000 lits, mais l’essentiel portera sur 2007 et 2008), hôpitaux contraints de diminuer leur activité avec un délai minimum de temps d’attente pour être soigné de 16 semaines, imposé par l’Etat, puis « règle de la double claque », c’est-à-dire que le financement de l’année suivante est amputé du déficit, tout en devant assurer le même niveau de service. »
    Le rapporteur constate que « les hôpitaux se sont livrés à une chasse frénétique aux économies ».
    L’imposition irresponsable par l’Etat anglais d’un retard de soins obligatoire est particulièrement démonstrative de la philosophie qui soutend cette réforme. Les motivations et les objectifs sont strictement financiers et en complète contradiction avec la qualité des soins.
    L’emploi du terme « double claque » est révélateur du mépris de l’Etat anglais pour ses hôpitaux.

    Sources :
    Discours du Président de la République, 14 avril 2008, Neufchâteau.
    Rapport du Comité National d’Ethique, décembre 2007.
    Texte de la Fédération hospitalière de France : « Hôpital public, Etat d’alerte », disponible sur le site : http://www.appel-sauver-hopital.fr/

  6. yh dit :

    suite à la lecture de ce texte, on aurait souhaité connaitre les propositions de mme vilamot pour:

    1) réduire le déficit de l’assurance maladie ( augmenter les cotisations?)

    2) qu’elle nous explique pourquoi la france obtient de moins bons résultats en santé publique que certains de nos voisins ( ex taux de mortalité infantile) alors que nous dépensons plus.( 11% du pib ; progression importante ces dix dernières années ; beaucoup plus que la moyenne du g7)

    3) qu’elle nous donne sa position sur la liberté d’installation des praticiens.

    4) qu’elle nous explique les taux d’hospitalisation particulièrement élevés en france ( les pays scandinaves affichent des taux 2 fois inférieurs)

    5) qu’elle nous parle du mandarinat hospitalier ( je ne suis pas sur que le pouvoir à l’hopital soit entre les mains des adminisratifs)

    6) qu’elle nous parle de la compétence des chirurgiens ou obstétriciens dans les petites structures qui opèrent peu ( pardon c’est tabou!)

    en un mot , qu’elle propose…

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