Référendum d’initiative partagée, du bon usage de la CMP

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Le jeudi 21 novembre prochain, l’Assemblée sera saisie des résultats de la Commission mixte paritaire réunie le 31 octobre dernier et portant sur le projet de loi organique « portant application de l’article 11 de la Constitution » qui avait été déposé par le gouvernement Fillon le 22 décembre 2010.

Trois ans après, il est probable que ce texte finisse par être adopté. Je ne reviendrai pas sur ses pérégrinations institutionnelles, la seule consultation des différentes étapes sous la précédente législature et sous l’actuelle suffit à renseigner sur les difficultés rencontrées.

Et encore je ne suis pas certain de cette adoption. En effet, les textes adoptés par le Sénat et par l’Assemblée n’étant pas identiques, la CMP a très logiquement cherché un compromis. Sur beaucoup de points, cela nécessita un patient travail de rapprochement mais l’accord fut trouvé à la satisfaction de tous.

Par contre, une difficulté fut nettement plus délicate à résoudre. Elle portait sur le rôle du Conseil Constitutionnel dans la procédure.

Pour nos collègues sénateurs, il lui appartenait d’assurer le contrôle des opérations. A leurs yeux, la lecture de la Constitution ne laissait aucun doute puisque l’art.  prévoit en son quatrième alinéa, que « les conditions [...] dans lesquelles le Conseil constitutionnel contrôle le respect des dispositions de l’alinéa précédent sont déterminées par une loi organique ».

Pour notre part, estimant que le Conseil ne pouvait  pas vérifier seul la validité des 4,5 millions de soutiens, nous avions retenu le principe d’une formation baptisée « commission de contrôle » sur laquelle le Conseil allait pouvoir s’appuyer pour remplir cette tâche.

Ce désaccord fut long à dénouer. Les deux rapporteurs (JP Sueur pour le Sénat et G. Geoffroy pour l’Assemblée) finirent par proposer une formule prévoyant que  »le Conseil constitutionnel veille à la régularité des opérations de recueil des soutiens à une proposition de loi. Il examine et tranche définitivement toutes les réclamations. Il peut être saisi par tout électeur durant la période de recueil des soutiens ou dans un délai de dix jours suivant sa clôture. Les réclamations sont examinées par une formation présidée par un des membres du Conseil constitutionnel et composée de deux autres membres désignés par le Conseil. Dans un délai de dix jours suivant la notification de la décision de la formation, l’auteur de la réclamation peut contester la décision devant le Conseil assemblé ». On mesure à la lecture le sens du compromis dont les deux rapporteurs ont fait preuve…

A la réflexion, je demeure persuadé que la version Assemblée était préférable sur le strict plan de l’interprétation constitutionnelle.

Ainsi je me demande si nous ne venons pas de réaliser ce que le Conseil appelle une « incompétence négative du législateur organique«   en créant une nouvelle structure au sein du Conseil Constitutionnel sans préciser son articulation avec le « Conseil assemblé » (formule qui figure dans l’art. 38 de l’ordonnance de 1958) ou sa composition.

De plus, en relisant la décision ° 2012-250 QPC du 8 juin 2012, par laquelle fut abrogée une disposition prévoyant la participation avec voix délibérative, au sein de la commission centrale d’aide sociale, de fonctionnaires issus des administrations dont les décisions sont contrôlées, je crains que notre CMP ait porté atteinte au principe constitutionnel d’impartialité dans l’exercice des fonctions juridictionnelles

Malheureusement, je ne vois pas comment sortir de ce dilemme. D’abord parce que la CMP a abouti, ce qui en général annonce une approbation par les deux Chambres. Et ensuite, parce que la proposition éventuelle d’un retour à la version de l’Assemblée que pourrait faire le gouvernement lors de la lecture du 21 novembre serait mal vécue au Sénat et entraînerait une hostilité de sa part, rendant impossible l’adoption définitive du texte avant la fin de l’année comme l’a souhaité le Président de la République.

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Une réponse à Référendum d’initiative partagée, du bon usage de la CMP

  1. Steven dit :

    Pourquoi l’appeler référendum d’initiative partagée alors que l’initiative n’appartient qu’aux parlementaires ?

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