Spécificités canadiennes

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Ma mission canadienne est terminée. Elle m’a permis de découvrir bien des innovations dans le domaine de la justice ou de la production de sécurité à Ottawa, Montréal ou Toronto.

J’aurai certainement à l’occasion de m’y référer mais d’ores et déjà je suis surpris, alors même que j’en connaissais le principe, par la vitalité de la méthode utilisée à travers tout le pays pour protéger les personnes et les biens.

Ainsi je reviendrai peut-être sur l’architecture originale de « police sous contrat » qui caractérise le modèle canadien. On est loin en effet des distinctions françaises entre la Police Nationale et la Gendarmerie nationale forces régaliennes organisées uniformément sur tout le territoire et la kyrielle des polices municipales dont l’hétérogénéité n’a d’égale que la diversité des missions qu’elles assument.

Mais mon propos du jour se veut centré sur le fait qu’au Canada, il n’existe pas de ZSP telle que conçue en France ces derniers mois par Manuel Valls. Aucune zone du territoire ou quartier particulier n’est ciblé par d’éventuels renforts d’effectifs ponctuels ou permanents ou des organisations particulières des services publics.

La situation de délinquance, quantitative et qualitative dans le pays, y compris dans des zones très différentes entre l’Est et l’Ouest, ne nécessite pas de tels dispositifs. En revanche, les structures pérennes de prévention et de lutte contre la délinquance montrent  une  action  commune  entre  services  et  administrations.  Elle  inscrit  la « production  de  sécurité »  dans  une  démarche  coordonnée,  non  seulement  des services publics, mais de toute la société.

Ainsi il existe des numéros d’appels vers les forces de l’ordre qui incitent à distinguer les urgences et chaque autre signalement, permettant à chacun de se recentrer sur son activité principale. En d’autres termes, ce sont les citoyens qui sont invités à hiérarchiser leur demande. S’ils l’estiment urgente alors ils doivent appeler un « numéro vert », s’ils pensent que leur signalement ne nécessite pas une intervention immédiate, ils appellent un autre numéro. Bel exemple de civisme..

Ensuite, la particularité de l’action de protection des citoyens par les forces de police est de s’exercer dans un contexte social de collaboration totale. La société canadienne vit autour d’une « bienveillance réciproque » de voisinage ou « d’attention citoyenne » à autrui, connu ou non. Dans son immeuble d’habitation, sa zone pavillonnaire, ou au travail  et  dans  la  rue,  chacun  se  sent  responsable  d’aider  les  services (municipaux, de services publics, de police) à exercer leur mission en portant à sa connaissance les éléments qu’il constate par lui-même et  juge utile au bien commun  général.  Cette  « façon  de  vivre » vraiment originale est  vécue  très positivement quels que soient les villes, quartiers, langues pratiquées, cultures ou ethnies rencontrés. Je doute malheureusement qu’elle corresponde à notre réalité culturelle.

Par contre, je ne vois pas ce qui pourrait s’opposer à s’inspirer des équipes mixtes d’intervention qui sont mises en œuvre sur le terrain. Elles regroupent des fonctionnaires municipaux et policiers, infirmiers, sociaux, médecins. Ces personnes travaillent ensemble et viennent en appui des patrouilles d’intervention. Elles agissent sur les lieux, prennent en compte les situations et suivent, après, leurs évolutions, en sollicitant l’une ou l’autre des compétences idoines (sécurité, santé, action sociale).

Ainsi, à Montréal, l’équipe EMRII (Equipe Mobile de Référence et d’Intervention en Itinérance) regroupe dix agents : 6 policiers et 4 infirmiers ou travailleurs sociaux. A Ottawa la « Mental Health Unit » regroupe 6 agents (3 policiers et 3 intervenants santé / social). Les exemples pourraient se poursuivre dans chaque territoire…

Ces équipes agissent directement sur la voie publique, en appui des – nombreuses ! – patrouilles de sécurité traditionnelles. Elles ont pour mission à la fois de décharger les services traditionnels d’accueil ou d’urgence (police, hôpital, centres sociaux) des cas les plus récurrents qui perturbent les efforts des unités de première intervention. Cela permet une rapidité dans la prise en compte de la difficulté et une fiabilité dans l’élaboration de la réponse adaptée. Bel exemple de cohérence au service du public !

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Une réponse à Spécificités canadiennes

  1. PERRETOZZI dit :

    Bonjour Monsieur le Député,
    Je veux juste réagir sur la phrase qui suit: »On est loin en effet des distinctions françaises entre la Police Nationale et la Gendarmerie nationale forces régaliennes organisées uniformément sur tout le territoire et la kyrielle des polices municipales dont l’hétérogénéité n’a d’égale que la diversité des missions qu’elles assument ». Il serait grand temps que l’adjectif « régalien » cesse d’être utilisé à tort et à travers, mais je doute que vous en connaissiez l’exacte signification: Qui appartient, qui tient à l’autorité ou à l’action royale. La régale était le droit pour un roi de percevoir les revenus des évêchés pendant leur vacances. Ceci bien sûr sans vouloir jouer sur les mots… Quant aux polices municipales dont je fais parti depuis 25 ans avec plusieurs postes à mon actif, force est de constater que vous avez un peu raison; à quand un statut uniformisant les missions et l’équipement de défense sur l’ensemble du territoire national ? Personnellement, avec un salaire et des avantages sociaux moindres, je ne veux pas faire le travail de la police ou de la gendarmerie.
    Je vous souhaite une bonne réception du présent message ainsi que de bonnes vacances si vous en prenez.

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