L’ordre et la morale

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Ce film de Mathieu Kassovitz est de parti pris, ce qui n’est pas en soi infamant.

Il raconte ainsi le point de vue d’un homme qu’il incarne, le capitaine Philippe Lecorjus alors chef du GIGN confronté à la prise d’otage d’Ouvéa en Nouvelle Calédonie en 1988 et présenté comme un juste soucieux de faire prévaloir le droit contre la force.

Il en découle une vision manichéenne selon laquelle les gentils sont la gendarmerie et surtout son groupe d’intervention et les méchants l’armée et les élus. Ainsi la gendarmerie, notamment celle qui sert en Nouvelle Calédonie tente de comprendre les motivations du FLNKS et de la population.  On voit par exemple ses chefs veiller à ce que le dialogue avec la population ne soit pas rompu…

En face, l’armée dont la rigidité est soulignée à chaque instant et qui ne sait mettre en place que la logique de guerre. Sans oublier les politiques, ministres ou conseillers, qui ne semblent obnubilés que par leur souci de victoire électorale puisque le drame se déroule à quelques jours du 2nd tour de la présidentielle. Car évidemment, la vie humaine ne pèse rien comparé à des enjeux politiques comme des scrutins électoraux…

On aura compris que la nuance est absente et que bien sûr l’ordre est plus fort que la morale.

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7 réponses à L’ordre et la morale

  1. Ronan dit :

    C’est un film politique qui mériterait je crois une réponse politique, ou des commentaires, des acteurs politiques de l’époque (Bernard Pons, Jacques Chirac, Michel Rocard…).

  2. seb dit :

    J’ai beaucoup apprécié ce film qui, il faut le souligner, ne prétend pas incarner une vérité historique, seulement donner un point de vue personnel sur un événement tragique de notre Histoire.

    Apparemment, l’histoire se base sur le témoignage unique du négociateur d’alors, plutôt que de confronter les points de vue…Même si, quelque part, en insistant sur la vision très personnel de LECORRJUS, le réalisateur cherchait à nous faire prendre conscience que les choses ne sont pas aussi simples et donc aussi manichéennes qu’on peut le croire.

    Personnellement, j’ai préféré ce film – qui pour moi interroge plus sur « la fin justifie t elle mes moyens » ? – à un film comme « Indigènes » qui donnait franchement l’impression que la « France » en tant que pays, instrumentalisait les citoyens (car ils étaient citoyens Français) de ses anciennes colonies, dans le seul but d’en faire de la chair à canon.

  3. David dit :

    Bonjour,
    Ancien militaire, j’ai travaillé pendant quelques mois avec une personne qui a participé à l’opération dans la grotte d’Ouvéa. Cette personne, ancien C.R.A.P, ancien du SPHP est aujourd’hui à la retraite de la gendarmerie et fait de l’instruction.

    Je ne me permettrai pas de jouer les donneurs de leçons ou le moraliste…. cependant je sais que ce qui a été fait là-bas n’était pas du tout légal et que la version des autorités (y compris sur la mort, d’une balle dans la tête, du leader indépendantiste) ne reflète pas du tout la vérité.

    (ps: je n’ai pas vu le film et ne compte pas le voir)

  4. Alice dit :

    Je vais aller voir ce film ce week-end car il semble que ce soit une œuvre cinématographique ET politique. Le making-off, très émouvant, montre qu’il a été très compliqué à réaliser et que les kanak qui y ont participé l’ont fait avec beaucoup de courage pour raconter leur vérité, tue depuis plusieurs années.
    Seb, Kassovitz dit s’être en premier lieu reposé sur l’enquête menée par la Ligue des Droits de l’Homme.

  5. jmestries dit :

    M le député,

    Les gendarmes de terrain qui ont participé directement à l’action sont un tantinet en désaccord avec ce film. armée média a rapporté tous les témoignages directs. J’invite vos lecteurs à les consulter pour savoir ce qu’en pensent les gendarmes, pas ceux des projecteurs, ceux de l’ombre.
    ( http://www.armee-media.com/ )
    merci

  6. seb dit :

    Merci à tous pour vos témoignages ou/et vos impressions. J’avoue que ce film m’a beaucoup appris – même si tout n’est pas parfait : c’est une fiction, pas un documentaire – et je pense faire quelques recherches pour avoir en tête toute l’affaire.

    Personnellement, je pense qu’il est difficile de juger la décision qui a été prise, car on est dans une situation très difficile.

    Et la DDHC – qui est pourtant mon guide dans beaucoup de situations – ne permet pas vraiment de trancher.

    « Article 7 : Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l’instant ; il se rend coupable par la résistance. »

    -Les Kanak font preuve – en prenant en otage des citoyens – de « résistance » à la loi (ne serait ce que la DDHC puisqu’ils entravent la liberté) : pour contrer cette « résistance », une « force publique » se voit octroyer la possibilité de recourir à la « violence légitime ».

    -la décision est prise – nous dit on – par le Président de la République et le Premier Ministre…Ils ont donc fait exécuter des actes pouvant relever de l’arbitraire, nonobstant la situation des Kanaks (résistants à la loi)

    -la décision a été exécutée par la force publique – gendarmes, policiers, élus de terrain, etc. – et son caractère « arbitraire », s’il est avéré, aurait dû susciter une sanction envers les exécutants

    Je trouve le titre du film bien choisi même si le réalisateur donne un ton trop manichéen à son oeuvre. Car ici, effectivement, difficile de savoir où est le droit et la morale :

    -la France a t elle usé de la force légitime que tout pays se voit reconnaître envers ceux qui privent de leur liberté autrui ? Une légitimité renforcée par son statut de « Patrie » des droits de l’homme ?
    -la France est elle en tort dans l’affaire ?
    -Les Kanaks sont ils victimes ou bien des preneurs d’otage qui méritaient bien leur sort ?
    -Les policiers sont ils ici des exécutants du droit…Ou les exécutants d’un régime quelque soit ses ordres ?

    Qui use de la force ? Qui tient le drapeau de la morale ? Qui défend le droit ? Qui a raison ? Qui a tort ?

    Difficile de se prononcer sur la question.

  7. lonchamp dit :

    des hommes que des hommes armés et pourtant désarmés , courageux et peureux pas un monde de femmes , c’est le dialogue qu’il aurait fallu engager jusqu’au bout et qui n’a pas trouvé d’issue ,les décisions sont au POUVOIR au sentiment de supériorité: écraser c’est gagner pour certains,pas perdre la face ,justifier l’action militaire,le plus difficile c’est ce que voulaient entreprendre les kanaks : se parler dire ses frustrations trouver ensemble hommes et femmes …..avec du recul pas si difficile et c’est ce que l’on demande aux politiciens d’avoir ce fameux recul qu’ils n’auront jamais dévorés par leur position de pouvoir, pas de place à l’humilité…..la réponse: encore des morts des morts

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